Les colocataires ~

Les kuronekos sont des démons japonais réputés pour avoir la capacité de prendre une apparence de chat noir et de se servir de ce « don » à mauvais escient, particulièrement pour causer du tort aux clans de démons ennemis. Sous leur apparence humaine, ils ont tous les cheveux bruns et ils sont tous très beaux pour une raison bien précise : si ils dévorent un individu humain du sexe opposé, leur vie est prolongée ou bien ils sont guéris de n’importe quel type de maladie. Mais ils doivent le faire discrètement, dans un lieu privé, donc ils doivent séduire ces humains, les attirer et les piéger... Sous leur apparence féline, ils ont un pelage noir comme la nuit et des yeux rouges sang qui révèlent les véritables démons qu’ils sont.

Je suis le fils du chef du clan des kuronekos, ce qui signifie que dès mon plus jeune âge j’ai su que lorsque j’aurai 22 ans, je prendrai sa succession et je devrai lui dire avec quelle femme je souhaite me marier le jour de cet anniversaire. J’ai été élevé dans une grande maison japonaise avec mes parents. Je n’allais pas à l’école car mon père avait engagé un professeur particulier pour m’enseigner tout ce qu’il y a à savoir. Je ne me mélangeais pas souvent aux autres enfants, mais j’aimais regarder le paysage par la fenêtre de ma chambre, c’était une maison presque identique à la mienne, elle a dû être bâtie au même moment en face de la mienne. Un jour, quand j’avais 10 ans, j’étais sorti pour méditer dans le jardin. Une petite fille d’environ 4 ans passa tout près du grillage de mon jardin. Je la connais, c’est la fille des voisins, elle vit avec sa sœur et ses parents. Elle se rapprocha du portail et me fixa dans les yeux. Même à son âge elle différait des autres enfants. Elle avait de longs cheveux noirs qui lui descendaient jusqu’à la taille et de beaux yeux bleus foncés. Nous échangeâmes un regard durant lequel je tombai passionnément, irréfutablement amoureux d’elle. Je ne sus jamais si elle partageait mes sentiments car je n’arrivais pas à décrypter son expression ; de plus sa mère arriva très rapidement et la tira par la main tout en me regardant d’un air désapprobateur. En effet, les gens colportaient de nombreuses rumeurs au sujet de notre famille car l’on voyait de temps à autres mon père entrer avec des femmes ou ma mère entrer avec des hommes, mais en tout cas, aucun humain ne ressortait.

4 jours plus tard…

Comme à mon habitude je regardais par la fenêtre de ma chambre la maison d’en face. D’un coup, une voiture de police s’arrêta devant cette maison et quelques instants plus tard les policiers ressortaient de la maison, escortés de la petite fille que j’avais vue il y a quelques jours et de sa sœur. Ma mère, que je n’avais pas vu arriver, se mit à côté de moi. Je lui demandai la raison de cet événement, et elle me répondit que les deux petites filles étaient maintenant orphelines, car c’était deux bluebirds (un clan ennemi) qui avaient dévoré leurs parents et que les policiers les emmenaient dans un orphelinat. Je me fis la promesse de veiller sur mon amour, avant de la retrouver.

12 ans plus tard…

J’ai eu 22 ans le 16 mars. Ce jour-là, avant la cérémonie où je serai sacré chef de clan devant tous les autres kuronekos, mon père me demanda le nom de ma future épouse. Je le dévisageai et lui répondit :

<< C’est une humaine. >>

Après quelques instants sans rien dire, mon père éclata de rire. Au bout d’un moment, il se calma enfin et me redemanda :

<< Sérieusement, qui veux-tu épouser ?

-Jena. Une humaine. Grâce à nos vassaux qui l’ont espionnée, j’ai veillé sur elle depuis mes 10 ans, je connais tout sur elle. [Ma voix montait de plus en plus] Je sais où elle habite désormais, avec qui, j’ai même tué quelqu’un pour pouvoir vivre avec elle plus tard. C’était un vulgaire voleur avec qui elle voulait prendre le bateau pour aller je-ne-sais-où. [Je criais désormais] Oui, j’ai tué quelqu’un ! Et maintenant, je pars la rejoindre, que ça ne te plaise ou non, je pars, je pars !

- Lorenzo… [Mon père me regardait d’un air indifférent] J’ai toujours su que tu voulais nous trahir ainsi, nous abandonner. Pars si tu le souhaites, je me fiche de ta décision. Mais si un jour tu te retrouves seul, tu ne pourras jamais revenir ici.

- Très bien, quoi que tu dises, je pars. [Je commençai à tourner les talons pour sortir de la maison]

- Oh, et n’oublie pas...Les autres démons perçoivent ta présence. Autrement dit, si tu croises un autre kuroneko, il ne sera que trop content d’assassiner un traître de ton espèce.>>

Je fis mine de ne pas entendre mais, en sortant, je vis ma mère en larmes car elle avait suivi l’échange entre mon père et moi. Je mourais d’envie de la serrer dans mes bras, mais le seul fait de voir mon père m’adresser un sourire moqueur renforça ma résolution et je sortis de chez moi. Comme je connaissais l’adresse de Jena, je n’eus pas de mal à le retrouver après avoir pris l’avion.

Les bluebirds sont des démons japonais réputés pour avoir la capacité de prendre une apparence de petit oiseau bleu et de se servir de ce « don » à mauvais escient, particulièrement pour causer du tort aux clans de démons ennemis. Sous leur apparence humaine, ils ont tous les cheveux bleus et ils sont tous très beaux pour une raison bien précise : si ils dévorent un individu humain du sexe opposé, leur vie est prolongée ou bien ils sont guéris de n’importe quel type de maladie. Mais ils doivent le faire discrètement, dans un lieu privé, donc ils doivent séduire ces humains, les attirer et les piéger... Ils ont également une voix très mélodieuse, qui fait que l’on pourrait les écouter parler durant des heures. Sous leur apparence aviaire, ils ont un plumage bleu comme le ciel et des yeux rouges sang qui révèlent les véritables démons qu’ils sont. Néanmoins, ils ont la taille de moineaux, ce qui fait que ce n’est pas un clan de démons très puissant.

Je m’appelle Carmen. Je suis la fille de deux démons bluebirds. J’ai été élevée dans un milieu assez pauvre, car nous étions persécutés par les autres clans de démons, qui nous empêchaient de travailler, donc d’avoir un salaire. Nous ne pouvions pas non plus voler les humains, car nous devons éviter d’attirer l’attention sur nous, étant donné que l’on nous prenait pour un gang commettant des crimes, et souvent, quand un humain disparaissait sans raison apparente, c’était nous que l’on accusait. Quitter la ville nous était également impossible car les kuronekos, un autre clan de démons nous prenant pour leurs esclaves, avaient mis en place un sortilège nous empêchant de franchir les frontières de la ville. Ayant deux sœurs aînées, Maria et Rosalita, je compris très vite que quand elles sortaient la nuit, ce n’était pas pour aller en boîte. Elles allaient se prostituer. Aucune n’était majeure, mais c’était ça ou mourir de faim. Dès mes 14 ans, je les rejoignis sur les trottoirs. Je savais que ce n’était pas un métier sans risques, d’ailleurs j’avais toujours sur moi un petit poignard, dont je n’hésitais pas à me servir. Ma sœur Rosalita se moquait de moi en prétendant que j’étais paranoïaque. Mais un jour, un client vint la chercher. Je n’ai pas vu son visage dissimulé par un grand capuchon, mais je savais que c’était un démon, et il se déplaçait d’une étrange façon, presque reptilienne. Il emmena Rosalita et nous ne l’avons plus jamais revue. Il l’avait sans aucun doute tuée. Bizarrement, je ne ressentis aucune tristesse, pour ne pas dire de la joie. J’aimais mon métier, et je me rendis compte que je la considérais comme une concurrente. A partir de ce jour, je me mis à haïr les autres femmes, je rêvais de les éliminer une par une. Après tout, je suis une démone, j’ai tout mon temps, n’est-ce pas ?
Aujourd’hui, j’ai 20 ans. Ma sœur Maria ne me parle plus, mais ça, je m’en passe bien, de toute façon, tout portait à dispute entre nous. Elle avait remarqué mon agressivité envers elle depuis la mort de Rosalita, mais pensait que c’était parce que j’étais bouleversée. Je lui ai clairement fait comprendre que je ne voulais plus entendre parler d’elle. Je mourais d’envie de quitter la ville pour changer d’horizons, mais je ne pouvais toujours pas. Un soir, j’attendais le client et je vis arriver, toujours de la même démarche un peu furtive, Lorenzo, le futur chef du clan kuroneko. Il m’adressa un petit signe. Ce n’était pas un client qui revenait souvent, en même temps, vu la troupe d’admiratrices quasiment tout le temps présente dans son sillage, il avait du choix ! Malgré tout, nous nous entendions plutôt bien. Il connaissait mon envie de quitter la ville, je lui en avais parlé en espérant qu’il me dise comment contourner le sortilège. Comme je m’y attendais, il ne m’avait rien dit, mais ce soir-là, quand je lui en reparlai, il me regarda d’un air amusé et me dit uniquement « Patience. ». Le lendemain matin, je fis un petit tour en ville, et Meika, une fille de mon clan qui me prenait pour son amie, m’accosta. Avant de l’envoyer paître, j’écoutai ce qu’elle avait à me dire. Apparemment, Lorenzo avait été renié de son clan. En effet, c’était aujourd’hui qu’il devait se marier. Je ne savais pas quelle connerie il avait encore fait, mais c’était sûrement bénéfique pour moi. Car si il avait quitté le clan, ses parents qui maintiennent le sortilège en place ont dû avoir une baisse de pouvoir. J’écartai Meika de ma route, et je me mis à courir en direction de la frontière de la ville la plus proche de moi. Effectivement, je perçus un léger défaut dans le sortilège, très mince, juste la place pour un petit oiseau de passer. Je me métamorphosai, et quelques instants plus tard, j’étais enfin dehors. Je repris forme humaine. Certes, je n’avais ni bagages, ni foyer, mais je pouvais gagner de l’argent facilement en tous lieux. Après tout, qui sait où me mènera ma route ? ~